Dans cette grande salle du quartier du Vieux Lille, en cette fin d’après-midi du 15 mars, Fabien Roussel et Léon Deffontaines font les cent pas. Le rendez-vous avec le public est prévu pour 19h30. Mais d’ici là, le secrétaire national du PCF et la tête de liste du Parti pour les élections européennes s’apprêtent pour une conférence de presse. Mais les journalistes locaux ne l’entendent pas de cette oreille. Ils veulent le jeune candidat pour eux tout seul : interview les yeux dans les yeux pour La Voix du Nord, direct au JT de 19 h pour France 3.
Qu’à cela ne tienne. La conférence de presse est annulée. C’est que la presse semble toujours intriguée par ce jeune candidat amiénois, ex-secrétaire général du MJCF et porte-parole de Fabien Roussel lors de sa course à l’Élysée en 2022.
Précisément, les deux hommes vont avoir l’occasion de montrer leur complicité face à un public qui va assurer une salle comble et qui est venu avec de nombreuses questions. D’emblée, la secrétaire de la fédération du Nord, Karine Trottein, dans le rôle de cheffe d’orchestre de la soirée, promet : « Pas de longs discours, mais des échanges et des partages avec la salle ».
Avant ces échanges, les colistiers qui entourent la tête de liste présentent le sens de leur engagement. Héloïse Dhalluin, agent SNCF, membre du CSE de Fret SNCF et conseillère régionale, tacle le néolibéralisme qui casse le transport public et insiste sur la nécessité d’un véritable service public pour les voyageurs. Eddie Jacquemart, conseiller municipal de Lille et président de la Confédération nationale du logement (CNL), décrit son combat pour le logement social. Les participants applaudiront aussi Manon Ovion, la syndicaliste qui a mené les 83 jours de grève de l’entreprise nordiste Vert Baudet l’an dernier et qui plaide pour une hausse du Smic qui « entraînera la hausse de l’ensemble des salaires ». Le parlementaire européen sortant, Emmanuel Maurel (Gauche républicaine et socialiste), cite Lula pour défendre une « gauche de tous les jours de la vie ». Samia Jaber, conseillère départementale de Belfort et colistière, s’écrie contre le projet libéral de Bruxelles, le déclassement, les délocalisations industrielles, la guerre...
À leur suite, Fabien Roussel et Léon Deffontaines n’ont pas de mal à déclencher des tonnerres d’applaudissements. Ce dernier précise encore la composition de la liste qu’il mène : un tiers d’élus communistes engagés sur leur territoire, un tiers de responsables d’autres partis politiques de gauche, un tiers de responsables syndicaux représentant le monde du travail.
Dans une ambiance euphorique, le secrétaire national lui donne l’accolade : ce jour est celui de l’anniversaire de Léon Deffontaines (28 ans), c’est aussi celui du programme du Conseil national de la Résistance, les Jours heureux.
Le candidat développe sur ce thème. Il n’oublie pas que cette région du nord, les Hauts-de-France, a voté contre le traité européen de 2005 et a été trompée comme tous les électeurs. La remise en cause des traités est largement évoquée avec le public. La guerre également (en Ukraine et en Palestine) et l’escalade d’Emmanuel Macron.
Les questions fusent des rangs très serrés. Le « fabriqué en France », la souveraineté, les transports publics, les personnes en situation de handicap, la sortie de l’Otan... Et la guerre encore. « Nous ne sommes pas des pacifistes béats », défend Léon Deffontaines, « mais il est hors de question de devenir cobelligérants ». Dans le public, on perçoit quelques dissonances, notamment sur le positionnement du parti communiste russe sur l’engagement en Ukraine.
La soirée est revigorante et se poursuit au-delà des deux heures d’échanges. Ce soir, la liste menée par Deffontaines met des étoiles dans les yeux pour « reprendre la main en France et en Europe ».
Philippe Allienne
Article publié dans CommunisteS, n°988, 20 mars 2024.